Le 27 novembre 2010, par Geneviève Koubi,
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..... à l’attention des étudiants - M1. Droit des collectivités territoriales
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La circulaire du 10 septembre 2010 relative au contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics en matière de commande publique rend compte de l’avancée de la réforme envisagée en matière de contrôle de légalité initiée par le Conseil de modernisation des politiques publiques, c’est-à-dire en lien direct avec le dogme de la RGPP.
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Si le lien ne fonctionne pas, il est possible de consulter le document ci-joint :
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Il ne s’agit pas là de s’intéresser aux problématiques des marchés publics passés par les collectivités locales ou leurs établissements [1]. L’objectif de cette signalisation est de proposer quelques pistes pour discerner les circuits [— de la réforme à venir ( ?) [2]—] du contrôle de légalité des actes des autorités locales [3] — et autant que faire se peut, de les confronter aux dispositions encore incertaines du régime des actes des autorités locales dérivées de la réforme des collectivités territoriales [4]. Cette mise en perspective ne revient pas à susciter de questionnements sur ce que recouvre l’idée d’un "recentrage" du contrôle de légalité autour d’actes locaux considérés par le gouvernement comme détenant un enjeu majeur : les marchés publics, l’urbanisme et le développement durable [5].
Au moins, dans cette circulaire, y est-il rappelé que « le contrôle de légalité est une mission constitutionnelle des préfets et une des garanties fondamentales du respect de l’Etat de droit. » Aussi, même en s’attachant à ces quelques priorités définies par l’Etat, le recentrage ne signifie pas nécessairement un rétrécissement des champs du contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales. Cela supposerait plutôt un renforcement de ce contrôle dans ces domaines spécifiques que l’Etat voudrait maîtriser suivant ses propres intérêts ou orientations. La ritournelle du ’bon emploi des fonds publics’ y est donc recommencée.
L’attention portée à la commande publique en l’espèce n’est qu’une des illustrations des enjeux d’une réforme. Il ne s’agit pas de rendre le contrôle de légalité plus strict mais plutôt de ressouder les intérêts économiques qui parcourent les politiques publiques, là à travers les marchés publics, autour de quelques axes privilégiés par une République irréprochable et un Etat exemplaire.
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1.
« Le contrôle doit être adossé à une stratégie partagée avec l’ensemble des services de l’Etat concernés qui, par leur connaissance et leur expertise, peuvent aider le représentant de l’Etat dans l’exercice de sa mission constitutionnelle de contrôle de légalité. » Cette phrase tirée de la circulaire mérite un temps d’arrêt.
. L’insistance sur la "mission constitutionnelle" invite à en retrouver les sources ; le sixième alinéa de l’article 72 de la Constitution dispose : « Dans les collectivités territoriales de la République, le représentant de l’État, représentant de chacun des membres du Gouvernement, a la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois. » Les conséquences quant à l’inertie administrative dans l’exercice de ce contrôle sont alors rappelées par une référence à la décision du Conseil d’Etat du 6 octobre 2000, Cne de Saint-Florent et autres, req. 205959 : les carences de l’Etat dans l’exercice du contrôle de légalité des actes des collectivités locales sont susceptibles d’engager la responsabilité de l’Etat lorsqu’elles constituent une faute lourde [6].
. L’idée de ’stratégie partagée’ doit aussi retenir l’attention. Elle enracine le principe de la mutualisation des services juridiques, depuis longtemps expérimenté et déjà mis en application dans le cadre du contrôle de légalité. En l’espèce, le recentrage s’entend d’un "plan départemental de contrôle" qui laisse supposer que la fonction d’un contrôle de légalité se planifie à partir de critères déterminés liant appréciation des contextes locaux et objectifs nationaux. Evidemment, les critères tirés des objectifs nationaux sont prédominants puisqu’ils constituent le "socle commun à toutes les préfectures" [7]. Le ’diagnostic local’ ne peut alors se réaliser qu’à partir de ce socle.
Il est alors intéressant de relever les transformations de la perception du contrôle de légalité : conçu ’a posteriori’ en 1982, il détiendrait désormais une dimension curative et une dimension préventive. L’idée est ’d’anticiper les difficultés’ que les collectivités locales rencontreraient dans le cadre de la commande publique... et peut-être, à terme, en d’autres domaines. En effet, la circulaire du 10 septembre 2010 propose ainsi d’aider les collectivités territoriales « qui rencontrent des difficultés à améliorer progressivement la qualité de leurs actes, décisions et délibérations » [8].
Quoiqu’il en soit, bien que la connaissance des « textes » soit un des piliers de la fonction ‘stratégique’ notamment lorsqu’il existe des enchevêtrements de normes impliquant des imbrications entre textes juridiques internes et européennes (communautaires), normes techniques et règles financières, celle des formes et procédures du contrôle de légalité l’est tout autant.
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2. Exercice
Le rappel effectué dans la circulaire quant à la nécessaire connaissance du droit est le prétexte accaparé pour la réflexion qui vous est ici proposée. Les étapes du contrôle de légalité sont rappelées dans la circulaire.
L’étude de la transmission des actes au préfet pourrait être utile pour reprendre les règles qui y sont relatives : sont-elles identiques pour toutes les catégories d’actes émanant des autorités locales ? [9]. Cette transmission doit-elle être le principal vecteur de la fonction de ’conseil juridique’ aux collectivités locales quelque peu dévolue aux préfets ? [10].
C’est à propos de l’exercice du contrôle de légalité par le préfet que l’invitation à l’approfondissement plus qu’une incitation à la digestion d’un cours, est ici formulée. Il s’agit, pour vous, de rechercher s’il est nécessaire de distinguer entre actes administratifs unilatéraux et contrats administratifs pour apprécier la fonction de ce contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales [11] et de repérer, pour chaque type d’acte, les différentes formes de recours contentieux dont dispose le préfet.
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[1] Sur ce point, il faut pourtant savourer la précision insérée à la première note de bas de page, en ce qu’elle avertit que les établissements publics de santé sont sortis de cet espace local pour intégrer le cadrage étatique depuis la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 dite "HPST" tant son intitulé est baroque : "portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires".
[2] Ex. de base : art. L. 2131-1 CGCT.
[3] V. également, Ord. n° 2009-1401 du 17 novembre 2009 portant simplification de l’exercice du contrôle de légalité.
[4] Notant que la loi adoptée étant sur le bureau du Conseil constitutionnel... en attente de sa censure et/ou de sa validation éventuelles, l’une et l’autre pouvant être partielles. Toutefois, la notion de "délibérations concordantes" pourrait constituer un thème pour un dossier.
[5] Encore que ce ne serait pas inutile...
[6] Ce qui est relevé en l’espèce puisque le préfet s’est abstenu de déférer au tribunal administratif des délibérations illégales dont les conséquences financières étaient importantes pour les communes concernées, ce pendant trois années consécutives.
[7] On notera que ce terme de socle s’insinue dans la plupart des domaines dans lesquels l’Etat veut prendre ou conserver une part active pour les définitions et orientations... sociales plus que juridiques.
[8] A ce titre, la technique du bilan formaté en points forts et en points faibles — mise en place pour bien des méthodes d’évaluation depuis 2007 — est répercutée au niveau des collectivités territoriales beaucoup plus que sur le terrain du contrôle de légalité, puisque la circulaire insiste sur le fait que les bilans de campagne de contrôle pourraient être transmis aux collectivités afin que « les exécutifs locaux soient en mesure de conforter les points forts et de remédier aux points faibles ainsi identifiés » !
[9] Et encore : La transmission est-elle obligatoire pour tous les actes ? Quels sont les délais de transmission ? Attention : ne pas oublier les références à la jurisprudence…
[10] Etude possible à envisager : La lettre d’observations du préfet à la collectivité territoriale.
[11] Ce qui ne peut être trouvé d’emblée dans cette circulaire...